Jean GOURGUET

 

 

Un artisan honnête

 

 

 

Né à Sète (Hérault) le 5 Décembre 1902

Décédé à Paris le 13 Mars 1994

Vrai Nom : Jean Marie Gourguet

 

 

BIOGRAPHIE

 

            Il y a un peu plus de cent ans naissait, à Sète, Jean Gourguet, presque en même temps que le cinéma dont il fut l'un des plus fervents serviteurs.

 

            A sept ans, il découvre le cinéma et sa vocation. Adolescent, il se fait renvoyer du Lycée Henri IV car il consacre plus d'énergie à écrire des scénarios, fréquenter les salles de cinéma et faire même de la figuration qu'à étudier. Ceci au grand désespoir de sa mère restée seule à Paris pendant que son mari était parti à la guerre.

 

            Pour gagner sa vie, Jean Gourguet réussit à se faire engager comme reporter à la pige à "Paris-Midi", puis comme journaliste au journal "Le Journal". Cette période lui permettra d'emmagasiner beaucoup d'anecdotes et faits-divers qui lui serviront plus tard dans l'écriture de ses scénarios. C'est aussi un choc pour lui issu d'un milieu privilégié, de découvrir les milieux populaires, la misère. Il épouse la cause des petites gens, allant jusqu'à déclarer "quand on est riche, on n'est pas intéressant parce qu'on a rien à dire".

 

            Puis, sous le pseudonyme de Rem de Bandi, il monte une petite troupe de théâtre, loue le théâtre Saint-Georges et crée le Théâtre d'obscurité. Il y présente des pièces dont il est l'auteur (et acteur également) et qui créent l'événement: certains le portent aux nues et l'appellent "Maître", d'autres le traitent de farceur.

 

            Tous ces chemins détournés n'ont qu'un but: réaliser son premier film. Il réussit enfin à s'acheter une petite caméra "Eyemo" qui fut sa fidèle compagne pendant des années et qu'il conservera toute sa vie. Il arrive a trouver le financement d' Un rayon de soleil  (rebaptisé par un distributeur Un rayon de soleil sur Paris) en 1928. Il eût à faire preuve de beaucoup d'astuces pour tenir son budget.

 

            Ce premier documentaire ayant été jugé prometteur, il réussit à tourner à Sète "L'Escale" en 1929, film muet sonorisé avec un tout nouveau procédé anglais qui se révéla, malheureusement pour lui, ne pas être au point, ce qui le mit en difficulté financière.

 

            Il rebondit en 1932 et enchaînera sans discontinuer - et malgré la guerre – courts métrages (dont plusieurs primés à l'exposition universelle de 1937 et grands films.

 

            En 1934, il découvre un jeune chanteur, Tino Rossi, qu'il fait jouer dans "L' Affaire Coquelet", film malheureusement disparu.

 

            Il réalise en 1941 "Le Moussaillon", puis en 1943 "Malaria" avec Mireille Balin, Sessue Hayakawa et Jacques Dumesnil. Un drame colonial pour lequel on reconstitue en studio la forêt vierge. En 1945, c'est "Son dernier rôle"avec Gaby Morlay, Dalio et Jean Tissier.

 

            Puis, il change complètement de style et décide de s'affranchir des studios en tournant en décors naturels pour plus de réalisme, et en imposant un jeu moins théâtral à ses acteurs dont certains ne sont pas des professionnels.

 

            On peut distinguer alors, dans ses longs métrages, trois périodes:

 

L'époque "Mélo" juste après la guerre (de 1946 à 1951) où il est un précurseur du cinéma néo-réaliste italien. Il tourne avec très peu de moyen avec ses fidèles interprètes: sa fille sous le pseudonyme de "la Petite Zizi" (puis Zizi Saint-Clair) et son chien Gundo (le Rintintin français). Certains le raillèrent en parlant du "cirque Gourguet", sa femme étant également son assistante. Cela ne le vexait pas car, disait-il, "Les gens du cirque sont des artistes véritables qui travaillent avec courage. Ils sont souvent méconnus, mais c'est leur vie, ils ont ça dans le sang". Ces films rencontrent un franc succès populaire.

 

L'époque "Coquine" (c'est ainsi que l'a qualifiée Frédéric Mitterrand lors de l'interview télévisée dans "Etoiles et Toiles") où il dépeint la jeunesse des années 50, n'hésitant pas à dénuder un sein (tel celui de Dany Carrel dans "Maternité clandestine"). Il s'entoure de nombreux autres jeunes talents tels Michel Roux, Jean-Pierre Mocky, Maurice Sarfati, Roger Dumas, Raymond Bussières, Richard Bohringer, Joël Seria et Dany Carrel, Françoise Vatel, Annick Bouquet, Catia Cario, Mariane Lecène, Junie Astor, Annie Roudier, etc… tout en continuant à faire tourner les anciens acteurs du cinéma (ou du théâtre)  français tels Rellys, Jacques Dumesnil, Georges Chamarat, Louis Seigner, Pierre Larquey, Andrex, Robert Vattier, Noël Roquevert, Pierre-Jean Vaillard, Dora Doll, Maryse Martin, Suzanne Grey, Geneviève Kervine, etc. Ses films sont plus légers et rythmés; ils sont annonciateurs de la Nouvelle Vague. Ils marchent bien: son public le suit.

 

Nouvelle période avec un film "La Traversée de la Loire", pour une part autobiographique, sur l'exode pendant la dernière guerre, période qu'il a vécu. Il y met beaucoup de lui-même, ne sachant d'ailleurs pas que ce serait son dernier film. Le succès n'est pas au rendez-vous bien que le film soit apprécié par les spectateurs qui l'ont vu.

 

            La Nouvelle Vague est là. Il se sent mis sur la touche. D'autant que sa plus fidèle collaboratrice et épouse Michelle Gourguet (qu'il a connu à l'Ecole Normale de Dijon pendant le tournage de Jeannette Bourgogne), co-scénariste et assistante, est atteinte d'une grave maladie.

 

            Il écrit des livres et un recueil de poésie (inédits) pour le plaisir de l'écriture. Il refuse plusieurs propositions du cinéma américain et se retire pour exploiter sa salle de cinéma parisienne "L'Escurial" qui deviendra son dernier lien avec le cinéma qu'il a tant aimé.

 

            Il voit et revoit les films des autres – et parfois les siens! – et surtout, continue à servir ce public qu'il n'a cessé d'aimer et respecter.

 

            Il donne leur chance à de jeunes cinéphiles, fous du cinéma comme il le fut, en accueillant le ciné-club "Cinequanon" qui inventa la formule de la "Dernière séance" dont Eddy Mitchell s'est très certainement inspiré par la suite. Ce ciné-club fait un malheur: combien de cinéphiles, cinéastes, acteurs, gens du cinéma ne sont-ils pas venus…

 

            Jean Gourguet trouve une seconde jeunesse auprès de ces jeunes qui partagent son enthousiasme et sa passion du 7ème art et qui sont fascinés par toute sa connaissance du premier demi-siècle du cinéma.

 

            Il fait également confiance à une toute nouvelle équipe de passionnés du cinéma qu'il aide à réaliser leur rêve en acceptant de leur confier l'exploitation de sa salle. Il permit ainsi à Jean-Jacques Zilbermann de devenir par la suite metteur en scène de théâtre et de cinéma.

 

            Jean Gourguet s'éteint en 1994, au-dessus de "L'Escurial", dans ce petit appartement de fonction qu'il s'est toujours refusé de quitter, tout proche de "son cher public".

 

            Comment résumer Jean Gourguet?

 

            Il se définit lui-même comme un modeste artisan du cinéma, anticonformiste, poète et écrivain à l'humour parfois décapant (ses origines sétoises…), préoccupé par les thèmes sociaux.

 

            Il est producteur (ou co-producteur), scénariste (ou co-scénariste) et metteur en scène. Il réinvestit courageusement toutes les rentrées d'un film dans le suivant. Ce n'est pas toujours facile, mais il garde son indépendance à laquelle il est très attaché.

 

            Il aime écouter et aider les gens dans la difficulté, ayant connu lui-même des périodes difficiles. Il est fidèle en amitié et exige la réciprocité. Sous un aspect presque austère, il cache une grande sensibilité (il peint, fait des croquis et est mélomane): il est capable de la plus grande fantaisie et a une imagination plus que débordante.

 

            Il se veut être un homme d'honneur, sans concession, pouvant toujours regarder ce qu'il a fait "la tête haute" selon son expression, toujours très modeste, fuyant les mondanités et les honneurs, la publicité ce qui, bien évidemment, a nui à sa carrière.

 

            Il a su garder, toute sa vie, sa capacité d'émerveillement et son tempérament de méditerranéen passionné.

 

 

© Geneviève COSTOVICI-GOURGUET pour Les Gens du cinéma.

http://www.jean-gourguet.com         

 

 

 

FILMOGRAPHIE

 

1928  Un rayon de soleil / Rayon de soleil / L’effet d’un rayon de soleil sur Paris : de Jean Gourguet

                               et Georges Péclet, avec Mona Goya

                                               + Producteur

1929  L’escale / Huit jours dans un port : de Jean Gourguet

avec Jenny Luxeuil

                                               + Scénario

1933  Le sport périlleux : de Jean Gourguet – Court Métrage –

Les Tutti-Frutti : de Jean Gourguet – Court Métrage –

avec Jean Duvaleix

                                               + Producteur

Un drôle de numéro : de Jean Gourguet – Court Métrage –

avec Jean Duvaleix

                                               + Montage

1934  L’affaire Coquelet : de Jean Gourguet

avec Robert Le Vigan

Le cantique de la mer / Kanen Ar Mor : de Jean Gourguet – Chanson Filmée –

avec Jean Lumière

                La chanson des genêts : de Jean Gourguet – Chanson Filmée –

avec Jean Lumière

1935  La grande pastorale : de Jean Gourguet – Court Métrage –

                                               ○ Prix d’Honneur à l’Exposition Internationale des Arts et des Techniques, Paris 1937

Sur un marché normand : de Jean Gourguet – Court Métrage –

1936  Les coulisses du Zoo : de Jean Gourguet – Court Métrage –

                                               ○ Prix d’Honneur à l’Exposition Internationale des Arts et des Techniques, Paris 1937

1937  Chansons de France : de Jean Gourguet – Court Métrage –

                Les moins de 7 ans : de Jean Gourguet – Court Métrage –

                                               ○ Prix d’Honneur à l’Exposition Internationale des Arts et des Techniques, Paris 1937

                Vivent les vacances : de Jean Gourguet – Court Métrage –

                                               ○ Médaille d’or à l’Exposition Internationale des Arts et des Techniques, Paris 1937

1938  Jeannette Bourgogne : de Jean Gourguet

avec Blanchette Brunoy

                                               + Adaptation et Découpage

1939  Bêtes captives : de Jean Gourguet – Court Métrage –

                La Bièvre, fille perdue : de René Clément – Court Métrage Documentaire –

                                               Seulement Producteur

1940  Singeries : de Jean Gourguet – Court Métrage –

1941  Le moussaillon : de Jean Gourguet

avec Roger Duchesne

                                               + Producteur

                Les chiens qui rapportent : de Jean Gourguet – Court Métrage –

                                               + Auteur de l’œuvre originale, Commentaires et Montage

1942   Malaria : de Jean Gourguet

avec Sessue Hayakawa

                                               + Scénario et Producteur

                Jeux d’enfants : de Jean Gourguet – Court Métrage –

                               avec La petite Zizi

1945  Son dernier rôle : de Jean Gourguet

avec Gaby Morlay

                                               + Producteur

L’enfant et les bêtes : de Jean Gourguet – Court Métrage –

avec La petite Zizi

                                               + Scénario et Producteur

1946  Le pavillon de la folle : de Jean Gourguet – Moyen Métrage –

avec Marthe Mellot

                                               + Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur

1947  La neige du coucou : de Jean Gourguet – Moyen Métrage –

avec La petite Zizi

                                               + Scénario et Producteur

                Sur des airs d’autrefois / La belle époque : de Jean Gourguet – Court Métrage –

                                               + Scénario et Producteur

1948  Les orphelins de Saint-Vaast : de Jean Gourguet

avec Georges Chamarat

                                               + Scénario, Dialogues, Montage et Producteur

1949  Zone frontière : de Jean Gourguet

avec Perrette Souplex

                                               + Scénario, Dialogues et Producteur

1950  Trafic sur les dunes : de Jean Gourguet

avec Suzy Prim

                                               + Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur

1951  Une enfant dans la tourmente / L’enfant dans la tourmente : de Jean Gourguet

avec Blanchette Brunoy

                                               + Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur

                Un rayon de soleil : de Jean Gourguet – Moyen Métrage –

avec Pierre Malar

                                               + Scénario, Adaptation, dialogues et Producteur

1952  Les révoltés du Danaé : de Georges Péclet

avec Robert Berri

                                               Seulement Producteur

                Le secret d’une mère : de Jean Gourguet

avec Blanchette Brunoy

                                               + Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur

1953  La fille perdue : de Jean Gourguet

avec Claudine Dupuis

                                               + Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur

                Maternité clandestine : de Jean Gourguet

avec Dora Doll

                                               + Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur

                Tabor : de Georges Péclet

avec Armand Mestral

                                               Seulement Producteur

1954  La cage aux souris : de Jean Gourguet

avec Dany Carrel

                                               + Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur

1955  Les premiers outrages : de Jean Gourguet

avec Maurice Sarfati

                                               + Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur

1956  Du sang sous le chapiteau : de Georges Péclet

avec Ginette Leclerc

                                               Seulement Producteur

                Les promesses dangereuses : de Jean Gourguet

avec Rellys

                                               + Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur

1957  Les gaietés de l’escadrille : de Georges Péclet

avec Raymond Bussières

                                               Seulement Producteur

Isabelle a peur des hommes : de Jean Gourguet

avec Cathia Caro

                                               + Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur

1958  La P… sentimentale : de Jean Gourguet

avec Maria Vincent

                                               + Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur

1959  Les frangines : de Jean Gourguet

avec Dora Doll

                                               + Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur

1961  La traversée de la Loire : de Jean Gourguet

avec Henry Vilbert

                                               + Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur

 

 

ã Jean-Pascal CONSTANTIN pour Les Gens du Cinéma (Mise à jour 05/07/2004)