Vrai
Nom : Jean Marie Gourguet
Il y a un peu plus de cent ans naissait, à Sète, Jean
Gourguet, presque en même temps que le cinéma dont il fut l'un des plus
fervents serviteurs.
A sept ans, il découvre le cinéma et
sa vocation. Adolescent, il se fait renvoyer du Lycée Henri IV car il consacre
plus d'énergie à écrire des scénarios, fréquenter les salles de cinéma et faire
même de la figuration qu'à étudier. Ceci au grand désespoir de sa mère restée
seule à Paris pendant que son mari était parti à la guerre.
Pour gagner sa vie, Jean Gourguet
réussit à se faire engager comme reporter à la pige à "Paris-Midi",
puis comme journaliste au journal "Le Journal". Cette période lui
permettra d'emmagasiner beaucoup d'anecdotes et faits-divers qui lui serviront
plus tard dans l'écriture de ses scénarios. C'est aussi un choc pour lui issu
d'un milieu privilégié, de découvrir les milieux populaires, la misère. Il
épouse la cause des petites gens, allant jusqu'à déclarer "quand
on est riche, on n'est pas intéressant parce qu'on a rien à dire".
Puis, sous le pseudonyme de Rem
de Bandi, il monte une petite troupe de théâtre, loue le théâtre
Saint-Georges et crée le Théâtre d'obscurité. Il y présente des pièces dont il
est l'auteur (et acteur également) et qui créent l'événement: certains le
portent aux nues et l'appellent "Maître", d'autres le traitent de
farceur.
Tous ces chemins détournés n'ont
qu'un but: réaliser son premier film. Il réussit enfin à s'acheter une petite
caméra "Eyemo" qui fut sa fidèle compagne pendant des années
et qu'il conservera toute sa vie. Il arrive a trouver le financement d' Un
rayon de soleil (rebaptisé par un
distributeur Un rayon de soleil sur Paris) en 1928. Il eût à faire
preuve de beaucoup d'astuces pour tenir son budget.
Ce premier documentaire ayant été
jugé prometteur, il réussit à tourner à Sète "L'Escale" en
1929, film muet sonorisé avec un tout nouveau procédé anglais qui se révéla,
malheureusement pour lui, ne pas être au point, ce qui le mit en difficulté
financière.
Il rebondit en 1932 et enchaînera
sans discontinuer - et malgré la guerre – courts métrages (dont plusieurs
primés à l'exposition universelle de 1937 et grands films.
En 1934, il découvre un jeune
chanteur, Tino Rossi, qu'il fait jouer dans "L' Affaire Coquelet",
film malheureusement disparu.
Il réalise en 1941 "Le
Moussaillon", puis en 1943 "Malaria" avec Mireille
Balin, Sessue Hayakawa et Jacques Dumesnil. Un drame colonial pour lequel on
reconstitue en studio la forêt vierge. En 1945, c'est "Son dernier
rôle"avec Gaby Morlay, Dalio et Jean Tissier.
Puis, il change complètement de
style et décide de s'affranchir des studios en tournant en décors naturels pour
plus de réalisme, et en imposant un jeu moins théâtral à ses acteurs dont
certains ne sont pas des professionnels.
On peut distinguer alors, dans ses
longs métrages, trois périodes:
L'époque
"Mélo" juste après la guerre (de 1946 à 1951) où il est un précurseur
du cinéma néo-réaliste italien. Il tourne avec très peu de moyen avec ses
fidèles interprètes: sa fille sous le pseudonyme de "la Petite Zizi"
(puis Zizi Saint-Clair) et son chien Gundo (le Rintintin français). Certains le
raillèrent en parlant du "cirque Gourguet", sa femme étant
également son assistante. Cela ne le vexait pas car, disait-il, "Les
gens du cirque sont des artistes véritables qui travaillent avec courage. Ils
sont souvent méconnus, mais c'est leur vie, ils ont ça dans le sang". Ces
films rencontrent un franc succès populaire.
L'époque
"Coquine" (c'est ainsi que l'a qualifiée Frédéric Mitterrand lors de
l'interview télévisée dans "Etoiles et Toiles") où il dépeint
la jeunesse des années 50, n'hésitant pas à dénuder un sein (tel celui de Dany
Carrel dans "Maternité clandestine"). Il s'entoure de nombreux
autres jeunes talents tels Michel Roux, Jean-Pierre Mocky, Maurice Sarfati,
Roger Dumas, Raymond Bussières, Richard Bohringer, Joël Seria et Dany Carrel,
Françoise Vatel, Annick Bouquet, Catia Cario, Mariane Lecène, Junie Astor,
Annie Roudier, etc… tout en continuant à faire tourner les anciens acteurs du
cinéma (ou du théâtre) français tels
Rellys, Jacques Dumesnil, Georges Chamarat, Louis Seigner, Pierre Larquey,
Andrex, Robert Vattier, Noël Roquevert, Pierre-Jean Vaillard, Dora Doll, Maryse
Martin, Suzanne Grey, Geneviève Kervine, etc. Ses films sont plus légers et
rythmés; ils sont annonciateurs de la Nouvelle Vague. Ils marchent bien:
son public le suit.
Nouvelle
période avec un film "La Traversée de la Loire", pour une part
autobiographique, sur l'exode pendant la dernière guerre, période qu'il a vécu.
Il y met beaucoup de lui-même, ne sachant d'ailleurs pas que ce serait son
dernier film. Le succès n'est pas au rendez-vous bien que le film soit apprécié
par les spectateurs qui l'ont vu.
La Nouvelle Vague est là. Il se sent
mis sur la touche. D'autant que sa plus fidèle collaboratrice et épouse
Michelle Gourguet (qu'il a connu à l'Ecole Normale de Dijon pendant le tournage
de Jeannette Bourgogne), co-scénariste et assistante, est atteinte d'une
grave maladie.
Il écrit des livres et un recueil de
poésie (inédits) pour le plaisir de l'écriture. Il refuse plusieurs
propositions du cinéma américain et se retire pour exploiter sa salle de cinéma
parisienne "L'Escurial" qui deviendra son dernier lien avec le
cinéma qu'il a tant aimé.
Il voit et revoit les films des
autres – et parfois les siens! – et surtout, continue à servir ce public qu'il
n'a cessé d'aimer et respecter.
Il donne leur chance à de jeunes
cinéphiles, fous du cinéma comme il le fut, en accueillant le ciné-club "Cinequanon"
qui inventa la formule de la "Dernière séance" dont Eddy
Mitchell s'est très certainement inspiré par la suite. Ce ciné-club fait un
malheur: combien de cinéphiles, cinéastes, acteurs, gens du cinéma ne sont-ils
pas venus…
Jean Gourguet trouve une seconde
jeunesse auprès de ces jeunes qui partagent son enthousiasme et sa passion du 7ème
art et qui sont fascinés par toute sa connaissance du premier demi-siècle du
cinéma.
Il fait également confiance à une
toute nouvelle équipe de passionnés du cinéma qu'il aide à réaliser leur rêve
en acceptant de leur confier l'exploitation de sa salle. Il permit ainsi à
Jean-Jacques Zilbermann de devenir par la suite metteur en scène de théâtre et
de cinéma.
Jean Gourguet s'éteint en 1994,
au-dessus de "L'Escurial", dans ce petit appartement de
fonction qu'il s'est toujours refusé de quitter, tout proche de "son
cher public".
Comment
résumer Jean Gourguet?
Il se définit lui-même comme un modeste
artisan du cinéma, anticonformiste, poète et écrivain à l'humour parfois
décapant (ses origines sétoises…), préoccupé par les thèmes sociaux.
Il est producteur (ou
co-producteur), scénariste (ou co-scénariste) et metteur en scène. Il
réinvestit courageusement toutes les rentrées d'un film dans le suivant. Ce
n'est pas toujours facile, mais il garde son indépendance à laquelle il est
très attaché.
Il aime écouter et aider les gens
dans la difficulté, ayant connu lui-même des périodes difficiles. Il est fidèle
en amitié et exige la réciprocité. Sous un aspect presque austère, il cache une
grande sensibilité (il peint, fait des croquis et est mélomane): il est capable
de la plus grande fantaisie et a une imagination plus que débordante.
Il se veut être un homme d'honneur,
sans concession, pouvant toujours regarder ce qu'il a fait "la tête
haute" selon son expression, toujours très modeste, fuyant les mondanités
et les honneurs, la publicité ce qui, bien évidemment, a nui à sa carrière.
Il a su garder, toute sa vie, sa
capacité d'émerveillement et son tempérament de méditerranéen passionné.
© Geneviève COSTOVICI-GOURGUET
pour Les Gens du cinéma.
1928 – Un rayon de soleil
/ Rayon de soleil / L’effet d’un rayon de soleil sur Paris : de Jean
Gourguet
et
Georges Péclet, avec Mona Goya
○
+ Producteur
1929 – L’escale / Huit
jours dans un port : de Jean Gourguet
avec Jenny
Luxeuil
○
+ Scénario
1933 – Le sport
périlleux : de Jean Gourguet – Court Métrage –
Les Tutti-Frutti : de Jean Gourguet –
Court Métrage –
avec Jean Duvaleix
○
+ Producteur
Un drôle de numéro : de Jean
Gourguet – Court Métrage –
avec Jean
Duvaleix
○
+ Montage
1934 – L’affaire
Coquelet : de Jean Gourguet
avec Robert Le
Vigan
Le cantique de la mer / Kanen Ar
Mor : de Jean Gourguet – Chanson Filmée –
avec Jean Lumière
La chanson des
genêts : de Jean Gourguet – Chanson Filmée –
avec Jean Lumière
1935 – La grande pastorale :
de Jean Gourguet – Court Métrage –
○ Prix
d’Honneur à l’Exposition Internationale des Arts et des Techniques, Paris 1937
Sur un marché normand : de Jean
Gourguet – Court Métrage –
1936 – Les coulisses du
Zoo : de Jean Gourguet – Court Métrage –
○ Prix
d’Honneur à l’Exposition Internationale des Arts et des Techniques, Paris 1937
1937 – Chansons de
France : de Jean Gourguet – Court Métrage –
Les moins de 7
ans : de Jean Gourguet – Court Métrage –
○ Prix
d’Honneur à l’Exposition Internationale des Arts et des Techniques, Paris 1937
Vivent les
vacances : de Jean Gourguet – Court Métrage –
○ Médaille
d’or à l’Exposition Internationale des Arts et des Techniques, Paris 1937
1938 – Jeannette
Bourgogne : de Jean Gourguet
avec Blanchette
Brunoy
○
+ Adaptation et Découpage
1939 – Bêtes
captives : de Jean Gourguet – Court Métrage –
La Bièvre,
fille perdue : de René Clément – Court Métrage Documentaire –
○
Seulement Producteur
1940 – Singeries :
de Jean Gourguet – Court Métrage –
1941 – Le
moussaillon : de Jean Gourguet
avec Roger
Duchesne
○
+ Producteur
Les chiens qui
rapportent : de Jean Gourguet – Court Métrage –
○
+ Auteur de l’œuvre originale, Commentaires et Montage
1942 – Malaria : de
Jean Gourguet
avec Sessue
Hayakawa
○
+ Scénario et Producteur
Jeux
d’enfants : de Jean Gourguet – Court Métrage –
avec
La petite Zizi
1945 – Son dernier
rôle : de Jean Gourguet
avec Gaby Morlay
○
+ Producteur
L’enfant et les bêtes : de Jean
Gourguet – Court Métrage –
avec La petite Zizi
○
+ Scénario et Producteur
1946 – Le pavillon de la
folle : de Jean Gourguet – Moyen Métrage –
avec Marthe
Mellot
○
+ Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur
1947 – La neige du
coucou : de Jean Gourguet – Moyen Métrage –
avec La petite
Zizi
○
+ Scénario et Producteur
Sur des airs
d’autrefois / La belle époque : de Jean Gourguet – Court Métrage –
○
+ Scénario et Producteur
1948 – Les orphelins de
Saint-Vaast : de Jean Gourguet
avec Georges
Chamarat
○
+ Scénario, Dialogues, Montage et Producteur
1949 – Zone
frontière : de Jean Gourguet
avec Perrette
Souplex
○
+ Scénario, Dialogues et Producteur
1950 – Trafic sur les
dunes : de Jean Gourguet
avec Suzy Prim
○
+ Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur
1951 – Une enfant dans la
tourmente / L’enfant dans la tourmente : de Jean Gourguet
avec Blanchette
Brunoy
○
+ Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur
Un rayon de
soleil : de Jean Gourguet – Moyen Métrage –
avec Pierre Malar
○
+ Scénario, Adaptation, dialogues et Producteur
1952 – Les révoltés du
Danaé : de Georges Péclet
avec Robert Berri
○
Seulement Producteur
Le secret
d’une mère : de Jean Gourguet
avec Blanchette
Brunoy
○
+ Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur
1953 – La fille
perdue : de Jean Gourguet
avec Claudine
Dupuis
○
+ Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur
Maternité
clandestine : de Jean Gourguet
avec Dora Doll
○
+ Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur
Tabor :
de Georges Péclet
avec Armand
Mestral
○
Seulement Producteur
1954 – La cage aux
souris : de Jean Gourguet
avec Dany Carrel
○
+ Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur
1955 – Les premiers
outrages : de Jean Gourguet
avec Maurice
Sarfati
○
+ Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur
1956 – Du sang sous le
chapiteau : de Georges Péclet
avec Ginette
Leclerc
○
Seulement Producteur
Les promesses
dangereuses : de Jean Gourguet
avec Rellys
○
+ Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur
1957 – Les gaietés de
l’escadrille : de Georges Péclet
avec Raymond
Bussières
○
Seulement Producteur
Isabelle a peur des hommes : de Jean
Gourguet
avec Cathia Caro
○
+ Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur
1958 – La P…
sentimentale : de Jean Gourguet
avec Maria
Vincent
○
+ Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur
1959 – Les
frangines : de Jean Gourguet
avec Dora Doll
○
+ Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur
1961 – La traversée de la
Loire : de Jean Gourguet
avec Henry
Vilbert
○
+ Scénario, Adaptation, Dialogues et Producteur
ã Jean-Pascal CONSTANTIN
pour Les Gens du Cinéma (Mise à jour 05/07/2004)